Un patient peut-il contester le rejet de sa demande d’indemnisation, par la CCI, devant le juge administratif ? Une ordonnance du Tribunal administratif de Cergy Pontoise du 2 mai 2024 apporte un éclairage utile sur cette question, en matière de dommage survenu à l’issue d’un traitement implantaire.
Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise, ordonnance du 2 mai 2024, N° 2404107
Une patiente estime avoir subi des préjudices à l’issue d’un traitement d’implantologie orale (deux implants posés en 46 et 47 en 2019). En vue d’obtenir réparation, elle s’engage dans une procédure d’indemnisation amiable auprès d’une CCI, mais la Commission rejette sa demande.
La patiente saisit alors le juge administratif aux fins d’annuler l’avis de la Commission et d’enjoindre cette dernière à l’indemniser.
Dans son ordonnance du 2 mai 2024, le juge administratif évoque les missions des CCI et rappelle que la procédure d’indemnisation CCI n’est ni obligatoire ni exclusive d’une procédure contentieuse devant le juge compétent. Le demandeur conserve ainsi la faculté d’initier une telle procédure à tout moment de sa démarche auprès de la Commission.
Également, le juge administratif rappelle qu’il ne peut être saisi que dans le cas d’une contestation de l’offre indemnitaire proposée par la CCI (L. 1142-14 et suiv. CSP).
De ces différents éléments, le juge administratif conclut que l’avis d’une CCI n’est pas susceptible d’être contesté devant lui au titre d’un excès de pouvoir, « dès lors que la patiente conserve la faculté de saisir – si elle s’y croit fondée – le juge compétent d’une action en indemnisation, indépendamment de l’avis de la CCI« . La requête de la patiente est donc rejetée.
Cette courte ordonnance apporte un éclairage supplémentaire aux contentieux qui peuvent survenir entre les patients et les CCI, dans le cadre de procédures à visée d’indemnisation portant sur des dommages en chirurgie dentaire et en implantologie orale.
S’il n’est pas précisé, dans la présente ordonnance, les motifs du rejet de la demande par la CCI, il convient de rappeler que la procédure d’indemnisation CCI est soumise à des critères stricts de gravité, qui sont rarement atteints en chirurgie dentaire et en implantologie orale. Il est donc possible (voire, fortement probable) que le rejet porte sur l’absence de critères de gravité suffisant.
En effet, l’absence de critère de gravité suffisant constitue la principale raison pour laquelle peu de litiges, en chirurgie dentaire, sont portés devant les CCI au titre d’une demande indemnitaire. D’ailleurs, la MACSF n’en dénombre qu’une petite poignée dans ses rapports annuels et il y a fort à parier qu’il s’agisse de dommages particulièrement graves pour des victimes, avec atteintes d’ordre général (lire à ce sujet, F Camilieri, 2005).
Dès lors, en cas de rejet de la demande d’indemnisation par la CCI, la victime se verra dans l’incapacité d’effectuer un recours devant le juge administratif aux fins de faire annuler cette décision. Elle devra se tourner vers d’autres démarches à visée d’indemnisation, soit devant l’assureur, soit devant la juridiction compétente (tribunal judiciaire pour le secteur privé, tribunal administratif pour le secteur public).
Enfin, on n’abordera pas ici les procédures à visée de conciliation, autre mission de ces Commissions, qui sont carrément boudées par les victimes de dommages médicaux.