[Veille] Chèque that !

La jurisprudence en matière dentaire regorge (malheureusement) de contentieux portant sur des soins impayés par les patients. Lorsqu’ils sont assignés en justice, certains d’entre eux – mis devant le fait accompli – cherchent à s’extraire de leurs obligations en invoquant des soins fautifs. Une attitude critiquable que l’on ne retrouvera toutefois pas dans la présente décision de justice, qui porte sur une opposition, par le patient, du chèque destiné à régler des soins effectués par un chirurgien-dentiste, au motif d’un prétendu vol.

Tribunal judiciaire, Chambre des référés, Cabinet 3, Marseille, Jugement du 13 septembre 2024, Répertoire général nº 24/01993

Les faits

Un chirurgien-dentiste se fait remettre un chèque de 2292,55 euros par un patient. Au moment de l’encaissement, le chèque est retourné au praticien au motif que le patient a formulé une opposition pour vol.

Considérant cette opposition comme étant fallacieuse, le chirurgien-dentiste a fait assigner son patient et sa banque devant le juge des référés du Pôle de proximité du Tribunal Judiciaire de Marseille, aux fins d’obtenir (1) la mainlevée de l’opposition frauduleuse, (2) le paiement du chèque par la banque du patient et (3) la condamnation du patient au paiement des dépends, de la somme de 2292,55 € et d’une indemnité de 1500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La décision

Au procès, le chirurgien-dentiste et la banque du patient sont représentés par leurs avocats respectifs. Le principal intéressé, le patient, est quant à lui absent.

En premier lieu, le juge rappelle les motifs d’opposition du chèque prévus par la loi française : « Attendu que l’opposition au paiement d’un chèque, par application de l’article L 131-35 du code monétaire et financier n’est admis que dans l’hypothèse de perte, de vol, d’utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde de redressement ou liquidation judiciaire du porteur » ;

Ici, le chèque est bien signé de la part du patient et ce dernier (absent lors du procès) ne justifie par aucune pièce probante du bien-fondé de son opposition à paiement du chèque litigieux par suite de l’allégation de sa perte.

Ce faisant, le juge considère que l’opposition est manifestement frauduleuse et ordonne le paiement par la banque du montant du chèque. Le juge ajoute que si le compte du patient n’est pas suffisamment approvisionné, ce sera à lui – et non pas à la banque – d’indemniser le chirurgien-dentiste.

En plus de devoir régler le montant du chèque, objet du présent contentieux, le patient doit régler les dépends du procès et payer une indemnité de 1000 euros au chirurgien-dentiste et de 1000 euros à sa banque, au titre de l’article 700 du Code civil.

En conclusion, l’attitude fallacieuse du patient à l’égard de son praticien l’aura conduit à régler plus de 4300 euros d’indemnisation (sans compter les dépends que nous ne connaissons pas le montant ici). Joli calcul !


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